Marie-Louise Sarr, cinéaste et Chargée de la gestion du Master 2 Réalisation Documentaire de Création (RDC) de l’Université Gaston Berger (UGB) à Saint-Louis au Sénégal nous parle de son parcours dans le cinéma et les activités autour du programme.
Marie-Louise, une petite biographie sur votre évolution dans le cinéma…
Mon chemin a croisé celui du cinéma en octobre 2007 précisément. Je venais de finir la rédaction de mon mémoire de maîtrise de géographie et j’apprenais l’ouverture imminente d’une formation en Réalisation de films documentaires à l’Université Gaston Berger.
Ayant longtemps rêvé de faire des sensibilisations par l’image, je ne pouvais rater l’occasion de tenter ma chance. C’est ainsi que j’ai proposé ma candidature et elle fut retenue. Commença alors mon apprentissage du cinéma avec des camarades de promotion venus d’autres pays africains. Les débuts étaient difficiles car j’étais la seule de la promotion à n’avoir fait ni film, ni résidence d’écriture, ni études en cinéma. J’avais du mal à suivre le groupe mais petit à petit j’ai suivi le rythme et au final j’ai eu mon diplôme et réalisé un film de fin d’étude, « Chaîne alimentaire », qui a eu beaucoup de succès dans les festivals.
Dès lors, ma passion pour le cinéma ne cesse de grandir. En octobre 2010, j’ai été recrutée par l’UGB et Africadoc pour assurer la gestion, l’accompagnement et le suivi du Master 2 Réalisation Documentaire de Création. Depuis, je côtoie quotidiennement les étudiants et formateurs du Master, ce qui me permet de m’imprégner encore du documentaire et de suivre certains cours. C’est dans ce cadre que l’idée m’est venue de mettre en place, en 2011, une structure audiovisuelle à Saint-Louis spécialisée sur les films de commande et la couverture des grands événements de la ville pour être à termes « la mémoire de la vieille ville ». Actuellement je prépare le tournage de mon premier long-métrage « Retour à Joal » prévu le 10 septembre 2012.
Le Master 2 RDC de l’Université Gaston Berger qui existe depuis 2007, quels sont les objectifs de cette initiative. Et quels sont les résultats depuis cinq ans ?
Le Master 2 Réalisation Documentaire de Création a été mis en place à l’Université Gaston Berger du Sénégal en octobre 2007 grâce à la coopération entre l’Université Gaston Berger pour le Sénégal, l’Université Stendhal de Grenoble et l’Association Ardèches Images (Africadoc) pour la France. Il accueille chaque année 8 étudiants originaires d’Afrique francophone et pour la première fois, une candidature française à été retenue pour la promotion 2012-2013.
Le Master répond aux objectifs suivants:
- Donner aux étudiants accès aux enjeux artistiques et industriels qui traversent la culture documentaire ;
- Doter l’Afrique de l’ouest d’une formation de haut niveau dans un domaine où le continent doit être présent sous peine de dilution culturelle ;
- Amplifier le tissu des professionnels du cinéma et de l’audiovisuel documentaire en Afrique ;
- Assurer le renouvellement des générations et globalement amener la profession à un haut niveau de qualification.
Depuis cinq ans que le Master existe, une trentaine de films ont été réalisés sur Saint-Louis et ses environs, ce qui constitue un patrimoine visuel important. Aussi, avec les projections périodiques organisées dans les quartiers et les cinéclubs hebdomadaires à l’université, un public cinéphile est en train de se créer dans la vieille ville de même qu’un cadre d’échange entre cinéastes, cinéphiles, étudiants et hommes de culture. À cela s’ajoute la promotion de la culture africaine par la présence des diverses nationalités dont chacune laisse son empreinte dans les différents films réalisés chaque année.
Pouvez-vous nous parler de votre expérience en tant que Chargée de la gestion du Master 2 RDC ?
Il m’est difficile de parler de mon expérience puisque j’en ai pas encore beaucoup. C’est vrai que j’ai eu à encadrer deux promotions mais il en faut plus pour acquérir de l’expérience.
Tout ce que je puis dire c’est que j’apprends beaucoup aux contacts des différentes nationalités que je côtoie (étudiants comme formateurs). Ce n’est certes pas facile de gérer des adultes venant d’horizons différents et ayant une culture et une éducation différentes, mais à force de communiquer et d’essayer de comprendre l’autre, on arrive à instaurer un tant soit peu le dialogue nécessaire à la formation et au travail en équipe.
Concernant l’aspect administratif dont je n’avais que des notions basiques au départ, je peux dire, modestie à part, que je me débrouille pas mal surtout s’agissant du planning et de la programmation des enseignements.
Il y a plusieurs événements liés au Master 2 RDC (un festival, une journée d’études) quel est le résultat en ce qui concerne le public sénégalais en particulier et la culture cinématographique en général ?
Le festival « Saint-Louis en Images » qui est une initiative de la cinquième promotion du Master RDC est à ces débuts. La première édition était un test pour mesurer le thermomètre de la mobilisation des saint-louisiens et leur intérêt pour le cinéma. Cette année, nous avions plus misé sur les écoles mais pour les prochaines éditions, nous comptons élargir notre champ d’action pour toucher le maximum de gens.
Quant à la journée d’études organisée chaque année par le GRECIREA (Groupe d'Etude Cinéma du Réel Africain), elle produit une réflexion pluridisciplinaire sur l'émergence, depuis les années 2000, d'un nouveau cinéma documentaire en Afrique. Les organisateurs de cette journée pourront vous apporter plus de détails sur ses répercussions sur le public sénégalais.
Je vois aussi une forte présence des femmes au Master 2 RDC, croyez-vous que cette tendance est due au recrutement ou du résultat d’une prise de conscience chez les femmes vis-à-vis ce métier ?
La forte présence des femmes vient d’abord du recrutement. Depuis la première promotion, le Master encourage les candidatures féminines. Ainsi la 1ére promotion comptait 4 filles et 4 garçons, la deuxième 5 garçons et 3 filles, la troisième 4 garçons et 4 filles et ainsi de suite...Mais, je crois que c’est une tendance plus généralisée qui ne se limite pas qu’au cinéma. Nous vivons une époque où la « parité » fait loi et cela suscite une prise de conscience chez les femmes qui s’orientent vers presque tous les secteurs d’activités. Il n’y a plus d’activité strictement réservée aux hommes et vice versa. A mon avis, cette vague n’a pas épargné le 7e art. D’où l’affluence des candidatures féminines.
Entretien avec Marie-Louise Sarr par Beti Ellerson, septembre 2012.