Françoise Ellong a déjà une carrière bien lancée. Formée en communication et en cinéma, son imaginaire l’amène à tout ce qui peut l’enrichir. Elle parle de sa passion pour le cinéma et ses projets courants et futurs.
Françoise, quelle trajectoire incroyable pour une jeune femme de 23 ans! Comment était ton expérience avec l’image lors de ton enfance au Cameroun? D’où viens cette passion qui t’anime ?
Mon amour pour le cinéma n’est pas né au Cameroun, mais c’est effectivement le cas pour celui de l’écriture. J’ai découvert l’univers du scénario et des images à 17 ans, soit six ans après mon arrivée en France et je dois avouer qu’aujourd’hui, je ne saurais justifier de manière « raisonnable » ma passion pour le cinéma. Elle est là et me suit partout à chaque instant.
Tu as étudié la communication à Paris et le cinéma à Londres, ta formation comporte aussi des ateliers et des participations à plusieurs tournages. On voit une cinéaste émergente qui a une grande envie d’élargir ses connaissances au sein de divers environnements et expériences. Quelques réflexions?
Si j’ai commencé mes études par la communication, c’est parce que je suis d’avis que dans la vie de tous les jours, c’est absolument essentiel. D’un autre côté, je me suis forgée une sécurité, une façon de me dire « au cas où ». Et puis, c’est difficile de convaincre, surtout une famille africaine, qu’on veut faire du cinéma, que du cinéma et rien que du cinéma. Ce qui peut être aussi compréhensible à un certain niveau. La communication n’a pas été un leurre, loin de là, cette branche m’apporte beaucoup dans ma relation avec les différents acteurs du milieu. Communiquer, c’est primordial. En ce qui concerne Londres, mon premier souhait était d’aller faire un Master en cinéma aux Etats-Unis. Puis, je me suis laissée convaincre par un oncle de privilégier Londres, un conseil que j’ai suivi et que je ne regrette absolument pas. Je maximise en effet mes connaissances, mais je suis pour la politique « chacun sa place » dans le cinéma. En apprendre énormément en lumières, ne signifie pas que demain je me sens capable de réaliser un film et d’en être le chef opérateur. Non. Ce que ça m’apporte, c’est davantage de clarté dans l’échange que j’ai avec mes techniciens, rien de plus. Et puis, j’aime apprendre et je pense que dans ce milieu, on ne cesse jamais d’apprendre.
Les thèmes de tes films sont très éclectiques, traitants de nombreuses questions qui touchent la population parmi laquelle tu te trouves actuellement. Souvent, quand on imagine le "cinéma africain" on s'attend à voir des visages africains, filmé dans l'environnement africain. Est-ce que c’est un stéréotype? Quelques réflexions sur ce qui a inspiré ton choix de sujets, comme : Joue avec moi (2012), Now and them (2011), At Close Range (2011), Nek (2010), Big woman don't cry (2009), Miseria (2008), Dade (2007),...
En ce qui me concerne, je n’ai absolument pas l’impression de faire des films africains. Non pas que ça ne m’intéresse pas, mais les contextes de mes films ne le sont pas du tout. En revanche, je prépare plusieurs projets que je souhaite tourner surtout au Cameroun, avec des Camerounais. La nationalité d’un réalisateur n’a jamais été celle d’un film, alors je ne souhaite pas entrer dans ces jeux de mots qui quand on y entre, on en sort difficilement. Je m’intéresse beaucoup au cinéma africain, je l’observe et l’étudie de près et j'espère que dans très peu de temps, je vais pouvoir réaliser ses projets dont je parle plus haut. Quant aux inspirations liées à mes projets précédents, elles sont en effet très diverses et n’ont pas forcément de relations les unes après les autres. C’est une manière pour moi de dire que je n’ai pas envie qu’on m’enferme dans des cases. Mon imagination ne se restreint pas à des films clichés sur mes origines, ou au dernier coup de blues que j’ai eu le mois dernier. J’écris mes histoires sur la base de titres qui me viennent en tête. Autour de ce titre qui sort un peu de nulle part, je développe une idée, essayant de lui trouver un vrai sens.
Actuellement, on perçoit une tendance parmi les cinéastes africains à vouloir travailler dans une variété d'endroits hors de leur pays d'origine. Tu as travaillé beaucoup à Londres, à Paris où tu as grandi. Et tu as des projets pour le Cameroun. Quel rôle va jouer cette diversité dans l'identité de ton cinéma?
Mon cinéma me ressemble : imprévisible. J’ai tourné beaucoup entre Paris et Londres, je souhaite énormément tourner au Cameroun et dans toute l’Afrique. Je souhaite tourner dans tout pays dans lequel j’ai la possibilité de développer une idée. En ce qui me concerne, j’y vois une richesse infinie de sujets, de cultures, de rencontres et j’en passe…
Tu as une présence visible sur Internet et les réseaux sociaux, les bandes-annonces de tes films sur les sites vidéo, un moyen important pour promouvoir ton travail. Quel rôle veux-tu que ces médias jouent à l'avenir?
J’ai toujours vu tous ces médias comme des relais, qui me permettent moi de proposer un avant-goût au public. C’est par leur biais que j’arrive à susciter l’intérêt des personnes, que je donne envie aux gens de se déplacer lors de mes projections. Je suis pour les effets de buzz, mais lorsqu’ils sont intelligents. Je dissocie « buzz » et « matraquage », parce que pour moi, ce sont deux choses totalement distinctes.
Entretien avec Françoise Ellong par Beti Ellerson, décembre 2011
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