Eugénie Metala et Beti Ellerson en conversation | Eugénie Metala and Beti Ellerson in conversation.
Translation from French by Beti Ellerson. Images courtesy of Eugénie Metala.
Eugénie Metala dans les traces de Thérèse Sita-Bella: En tant que femme et camerounaise, dans le monde du cinéma—comme Sita-Bella plus de 60 ans avant elle et en tant que conteuse cinématographique, qui trace le chemin de cette femme énigmatique, Eugénie rétablit la mémoire d’une femme qui a fait une contribution indélébile au récit national du Cameroun.
Eugénie Metala in the footsteps of Thérèse Sita-Bella: As a Cameroonian woman in the world of cinema—as Sita-Bella more than 60 years before her, as a cinematic storyteller, who traces the path of this enigmatic woman, Eugénie restores the memory of a woman who has made an indelible contribution to the Cameroonian national story.
Beti Ellerson : Thérèse Sita Bella était une pionnière dans beaucoup de domaines, une pionnière en journalisme, la première femme africaine à réaliser un film—Tam Tam à Paris en 1963 ; aussi elle était pilote d’avion. Avant de discuter de l’évolution de votre film Sita Bella, la première, pouvez-vous nous parler de votre parcours, votre expérience dans le cinéma.
Eugénie Metala : Mon parcours dans le cinéma commence en 2020, après une formation professionnelle en montage audiovisuel, à ce moment je voulais travailler pour la télévision nationale, mais un de mes encadreurs qui travaillait aux Écrans Noirs me parlait beaucoup de cinéma, ça m’a intéressé et j’ai commencé à faire des recherches sur le cinéma, aller en salle et j’ai postulé aux ateliers Mwinda, un atelier en formation documentaire qui se déroulait dans la salle Sita Bella, dont j’entendais parler pour la première fois. En 2021 je réalise mon premier film L’autre match du football féminin, j’enchaine des formations en assistanat de réalisation fiction, dans le cadre du programme Impala, je monte trois films documentaires en 2022, je travaille sur la série Ewusu en 2023, et fin 2024, je réalise Sita Bella, la première dans le cadre du programme Patrimoines-Héritage.
Beti Ellerson: Thérèse Sita-Bella was a first in many fields. A trailblazing journalist, the first African woman to make a film—Tam Tam à Paris in 1963, she was a pilot as well. Before discussing the evolution of your film, Sita Bella, la première (Sita-Bella, the first), could you talk about how you came to cinema.
Eugénie Metala: My journey into cinema began in 2020, after professional training in audiovisual editing. At this time I wanted to work for the national television, but one of my coaches, who worked at Écrans Noirs talked to me a great deal about cinema, which piqued my interest. I started doing research on cinema, going to the movie theater, and I enrolled in the Mwinda workshops for training in the documentary, which took place in the room Sita Bella—which I heard about for the first time. In 2021 I made my first film, L’autre match du football féminin. From there I trained in assistant film directing. In 2022, within the framework of the Impala program, I edited three documentary films. In 2023 I worked on the series Ewusu, and in 2024 I made the film Sita Bella, la première, as part of the Patrimoines-Héritage program.
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BE : Pouvez-vous nous parler du documentaire Sita Bella, la première, Qu’est-ce qui vous a inspiré ?
EM : Sita Bella, la première est un film qui parle des paradoxes de la vie en s’appuyant sur le parcours atypique de Thérèse Bella Mbida, cette pionnière oubliée qui n’a pas eu la reconnaissance qui lui était due. Nous vivons dans un monde en perte constante de repère et nous avons besoin de références pour pouvoir avancer. L’histoire de Sita Bella c’est une histoire qui mérite d’être connue et racontée. On doit pouvoir être fier de vanter les mérites de celle qui nous a montré le chemin. En tant que femme cinéaste, je voulais poser un acte fort qui garde cette femme dans nos mémoires de manière à ce qu’elle ne meurt pas une deuxième fois.
BE: Could you talk about the documentary, Sita Bella, la première, what inspired you to approach this subject?
EM: Sita Bella, la première is a film that speaks about the paradoxes of life drawing from the atypical trajectory of Thérèse Bella Mbida, this forgotten pioneer, who did not receive the recognition that she deserved. We live in a world that is losing its bearings and we need references in order to move forward. Sita Bella’s story deserves to be known and told. We should be proud to celebrate the merits of the one who has shown us the way. As a woman cineaste, I wanted to make a powerful gesture which will hold this woman in our memories in such a way that she will not die a second time.
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BE : Vous êtes femme, camerounaise travaillant dans le monde du cinéma, voyez-vous Sita Bella comme référence ? Comment est-elle perçue dans la culture cinématographique camerounaise, dans la société en général ?
EM : Sita est plus qu’une référence pour moi, on ne saurait parler de cinéma camerounais dans le monde aujourd’hui sans parler de Tam Tam à Paris bien qu’il n’ait pas été vu par beaucoup. Au Cameroun Sita Bella est un modèle de vie, qui a impacté divers domaines, les gens ont pour elle du respect, de l’admiration et quelques lointains souvenirs, dans la culture cinématographique une salle a été nommée à son nom et c’est parfois le principal moyen à travers lequel les cinéastes camerounais eux-mêmes apprennent qu’il y a eu une telle femme autrefois.
BE: You are a Cameroonian woman in cinema, do you see her as a role model? What are the perceptions of Sita Bella in Cameroonian cinema culture?
EM: Sita is more than a role model for me, one cannot speak of Cameroonian cinema in the world today without reference to Tam Tam à Paris, even though many people have not seen it. In Cameroon, Sita Bella is a model of life, who made an impact in a variety of domains. People have much respect and admiration for her, and a few distant memories. A room in the movie theater at the cultural center is named after her, which is in many cases the primary means by which Cameroonian filmmakers themselves learn that there was once such a woman.
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BE : Comment avez-vous rassemblé le matériel pour le film, quelle a été votre démarche ?
EM : J’ai participé à l’atelier Patrimoine Héritage organisé par le réalisateur et producteur par Jean Marie Teno, et la maison de production Bandjoun Film Studio a mis à ma disposition le matériel technique et une équipe technique qui m’a accompagné du tournage à la post production de mon film.
BE: How did you gather material for the film, what was your process?
EM: I participated in the Patrimoine-Heritage workshop organized by the filmmaker and producer Jean-Marie Teno, and the production company Bandjoun Film Studio provided me with the technical material and technical crew which accompanied me throughout the film shooting and post-production of my film.
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BE : C’est quand même déroutant d’imaginer que la mémoire de cette femme pionnière soit tombée si profondément dans l’obscurité ? Bien sûr il y a une salle de cinéma à son nom, et peut être d’autres efforts pour lui rendre hommage. Ce film dédié à elle, espérons-le sera largement visionné. Est-il prévu de le présenter dans les festivals internationaux ?
EM : Le film suivra un plan de circulation que nous allons définir, qu’il s’agisse des projections dans des festivals sur le plan national et international. Avec les autres films de l’édition Patrimoines-heritage 2023 dont les thèmes tournent autour de la contribution des femmes dans les récits nationaux, des sorties en salles sont envisagées dans certains pays avec le soutien d’associations de luttes contre les violences faites aux femmes.
BE: It is certainly baffling to imagine that the memory of this groundbreaking woman fell so deeply into obscurity; yes, there is a cinema room named after her and perhaps other efforts to honor her. This film, that tells her story, will hopefully be viewed widely. Are there plans to present it at festivals internationally?
EM: The film will follow a trajectory that we are in the process of defining which entails national and international screenings. Along with the other films from the Patrimoine-Heritage 2023 edition, all of which are inspired by the theme around women’s contribution to the national story, we envision theatrical releases in certain countries with the support of associations whose mission is to end violence against women.
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BE : Voyez-vous ce film comme un moyen de faire revivre, faire connaitre son héritage ?
EM : Oui, ce film est pour moi une façon de faire revivre Sita Bella, de la sortir du silence dans lequel elle a été jeté, de faire connaitre ses œuvres, ses rêves et ses espoirs, ses combats et la fierté dans laquelle cette femme très pieuse et très croyante a préféré finir. C’est une opportunité de monter que la femme peut être plurielle et exceptionnelle, emmener les femmes à rêver et à se dire que quelqu’un d’autre a commencé à mener les combats auxquelles elles font face aujourd’hui et qu’elles doivent, que nous devons continuer en nous inspirant du parcours de Sita.
BE: Do you see this film as a way to restore her legacy?
EM: Yes, for me the film is a means to revive Sita Bella, to bring her out of the silence in which she was thrown into, to make her work known, her dreams and hopes, her combats, and with the pride in which this woman, so pious and devout, would have wanted at the end of her life. It is an opportunity to demonstrate that women are multi-dimensional and exceptional, to bring women towards their dreams, to show them that someone else began the combat which they face today and, inspired by Sita’s journey, that women must, that we must continue.