The purpose of the African Women in Cinema Blog is to provide a space to discuss diverse topics relating to African women in cinema--filmmakers, actors, producers, and all film professionals. The blog is a public forum of the Centre for the Study and Research of African Women in Cinema.

Le Blog sur les femmes africaines dans le cinéma est un espace pour l'échange d'informations concernant les réalisatrices, comédiennes, productrices, critiques et toutes professionnelles dans ce domaine. Ceci sert de forum public du Centre pour l'étude et la recherche des femmes africaines dans le cinémas.

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23 April 2020

RECENT FILMS : Machérie Ekwa Bahango - SEMA, un film du mouvement national des survivantes des viols et violences sexuelles en RD Congo | A film about the national movement of survivors of rape and sexual violence in the RD Congo

Machérie Ekwa Bahango
SEMA
2020 / 47min / Documentaire | Documentary

SEMA, a film about the national movement of survivors of rape and sexual violence in the RD Congo | un film du mouvement national des survivantes des viols et violences sexuelles en RD Congo.

Written and acted by 90% of the survivors of rape and sexual violence in the RD Congo, the aim of SEMA is to break the silence and raise consciousness about sexual violence in the conflict zone of the RD Congo and the entire world.

Écrit et joué à 90% par des survivant.e.s de viols et de violences sexuelles de l’est de la République Démocrtique du Congo, SEMA a pour but de briser le silence et de sensibiliser sur les violences sexuelles en zone de conflit en RD Congo et dans le monde entier.


Machérie Ekwa Bahango

Born in Kisagani, Democratic Republic of Congo in 1993. She took screenwriting and film directing workshops while studying Law. In 2016, she wrote six episodes of the series Nakisa: Lobi mokola ya sika, which was financed by the American NGO Search for Common Ground. Maki’la was her debut feature film.

Titulaire d'une licence en droit et passionnée de cinéma, elle a traduit en lingala des dialogues du film d'Alain Gomis, "Félicité", avant d'écrire et de réaliser "Maki'la", long-métrage mettant en scène des enfants de la rue qui lui a valu d'être repérée par DIFFA, puis Orange Studio. Produit par Emmanuel Lupia, ce film a bénéficié de l'aide à la finition du Fonds Image de la Francophonie en mai 2017.

26 February 2020

Festival Films Femmes Afrique 2020 - Mariam Donda : Maïmouna

Mariam Donda
Maïmouna
République Démocratique du Congo
2018 - 14 min - Documentary


Synopsis

Maimouna, une jeune fille malienne, rêvait d'étudier comme tout autre jeune de son âge mais elle n'a pas pu suite aux obligations de sa coutume : celle de se marier précocement. Suite aux conseils de ses amies elle décide de se révolter à l'égard de ses parents.

Maimouna, a young Malian girl, dreams of going to school like any other young person of her age but she cannot as she is obliged to follow the custom requiring girls to marry early. Following the advice of her friends, she decides to revolt against her parents.

Biographie | Biography

Mariam Donda, née en 1996 à Kinshasa en République Démocratique du Congo, est réalisatrice et scénariste. Après avoir acquis de l'expérience en réalisation et en écriture du scénario en 2015 à l'atelier de l'idée au film dans le cadre du Festival International de Cinéma de Kinshasa, elle décide de se lancer dans le domaine cinématographique. Elle réalise en 2018 son tout premier court métrage documentaire Maïmouna.

Mariam Donda, born in 1996 in Kinshasa in the Democratic Republic of Congo, is a director and screenwriter. After gaining experience in directing and scriptwriting during a workshop conducted at the International Film Festival of Kinshasa in 2015, she decided to enter into the world of cinema. In 2018, she directed her very first documentary short film Maïmouna.

08 July 2018

CINEF #4 2018 - Cinéma au féminin (Kinshasa) : Chronique congolaise | Congolese chronicle by/de Wendy Bashi


Court Métrage – Short
Documentary | Documentaire
Chronique congolaise | Congolese chronicle (2017)
Wendy Bashi (RDC)

SYNOPSIS

[English] 
December 19, 2016 marks the end of Joseph Kabila's second term. The Congolese constitution has no possibility for a third term. As we approach this historic moment, the DRC holds its breath. On the youngest online journal in the country, a real hunt for info begins!

[Français] 
Le 19 décembre 2016 marque la fin du deuxième mandat de Joseph Kabila. La constitution congolaise ne prévoit aucune possibilité pour un troisième mandat. A l’approche de ce moment historique, la RDC retient son souffle. Dans la plus jeune rédaction web du pays, commence une véritable chasse à l’info !


BIOGRAPHY | BIOGRAPHIE

[English] 
Wendy Bashi is a Congolese journalist and filmmaker based in Belgium. Since 2009, she has contributed to "Reflets Sud" and "Plural Africa", two programmes produced by CIRTEF [International Council of French-language Radios and Televisions] and TV5 Monde. She holds a Master's in Information and Communication from the University of Liege and a certificate from the London-based Thomson Reuters for the "Making TV News" course, obtained in 2012. In 2011, she completed an internship at the Swahili Department of The Voice of America. In May 2017, she joined the morning news team at the Francophone Africa department of Deutsche Welle. Since 2013 Bashi is a correspondent for Amina magazine. She was a freelance journalist for the program Afrik'Hebdo broadcast on RTBF International and is also editor for Glo.be, the Magazine of the Belgian development cooperation as well as Images Francophones the web magazine of the International Organization of the Francophonie. In addition, she is correspondent for the Africa service of the Deutsche Welle and works on an as needed basis on the Transversale programme, which is broadcast on La Première (RTBF). Wendy Bashi also participated in CIRTEF-TV5 Africa productions and programming. Since 2016, she has collaborated on the European Parliament-sponsored “Week of Africa”. To date she has produced three audio-visual documentaries and four 26-minute TV reports, which are broadcast on TV5Monde as well as numerous festivals. She also produces radio documentaries broadcast mainly on RTBF and Deutsche Welle.

[Français]
Wendy Bashi est une journaliste-Réalisatrice congolaise résidant en Belgique. Elle participe à « Reflets Sud » et « Afrique Plurielle », deux émissions produites par le CIRTEF [Conseil International des Radios et Télévisions d’Expression Française] et TV5 Monde depuis 2009. Elle est titulaire d’un master en Information et Communication de l’Université de Liège et d’un brevet de Thomson Reuters en « Making TV News » obtenu en 2012 à Londres. En 2011, elle a effectué un stage au département swahili de La Voix de l’Amérique. En mai 2017, elle rejoint l’équipe d’info matin au département Afrique Francophone de la Deutsche Welle.

Depuis 2013 elle est correspondante pour le magazine Amina. Elle a été journaliste pigiste pour l’émission Afrik’Hebdo diffusée sur les ondes de RTBF International. Elle est également rédactrice pour Glo.be, le Magazine de la coopération belge au développement ainsi qu’Images Francophones le web magazine de l’Organisation International de la Francophonie .Elle est correspondante pour le service Afrique de la Deutsche Welle et collabore de manière ponctuelle pour l’émission Transversale diffusée sur La Première (RTBF).

Wendy Bashi a également participé aux productions et à la programmation « CIRTEF-TV5 Afrique. Depuis 2016, elle travaille comme collaboratrice sur la semaine de l’Afrique organisée au Parlement européen.

A ce jour elle a réalisé 3 documentaires audiovisuels et quatre reportages de 26minutes diffusés sur TV5Monde ainsi que de nombreux festivals. Elle réalise également des documentaires radiophoniques diffusés essentiellement sur la RTBF ainsi que la Deutsche Welle.

Source: https://rebranding-africa.com/2017/10/02/wendy-bashi/

CINEF #4 2018 - Cinéma au féminin (Kinshasa) : Matolo by/de Fifi Solange Kabeya


Court Métrage – Short
Documentary | Documentaire
Matolo  (2016)
by/de Fifi Solange Kabeya
(RDC)


SYNOPSIS

[English] 
Hulk, a taxi driver in the Bandalungwa commune is a father of four and is addicted to drugs. He has no fixed address and often, he has to sleep under the stars.

[Français] 
Hulk est un chargeur de taxi dans la commune de Bandalungwa. Père de quatre enfants, il est par ailleurs accro à la drogue. Hulk n’a pas de domicile fixe, et il doit souvent dormir à la belle étoile.

Kin Realities : A collection of creative documentary films, "Kin Réalités" is a collective project produced by three Congolese production companies. The directors of Bimpa Productions, Clarimage and Uniproc give testimonies of the realities of Kinshasa. Health, football, transport, ecology, clothing are some of the topics addressed.

Kin Réalités : Collection de films documentaires de création, "Kin Réalités" est un projet collectif de trois sociétés de production congolaises. Les réalisateurs de Bimpa productions, Clarimage et Uniproc témoignent des réalités de Kinshasa. Santé, football, transports, écologie, habillement sont quelques-uns des thèmes abordés.

07 July 2018

CINEF #4 2018 - Cinéma au féminin (Kinshasa) : Ipseite Identique by/de Promesse Kitakya, Elisabeth Utamuliza


Court Métrage – Short
Documentary | Documentaire

Ipseite Identique  (2017)
by/de Promesse Kitakya, Elisabeth Utamuliza
(RDC)



SYNOPSIS

[English] 
Episode 5. The five episodes relate the life of the youth of Goma, exploring Goma’s peculiar phenomena, such as the similarities between the church and bar culture. In order to get to know the city from another point of view. The film was made as part of a workshop on web series, in collaboration of Amelia Umuhire and the Goethe Institute.

[Français] 
Episode 5. Les cinq épisodes racontent la vie des enfants à Goma, examinent les similitudes entre la culture du bar et les églises et présentent des artistes qui abordent les tabous et se consacrent à la relation amour-haine des citoyens de Goma à la nature. Pour apprendre connaître cette ville d’une autre point de vue. Le film a été réalisé dans le cadre d'un atelier sur les webséries, en collaboration avec Amelia Umuhire et l'Institut Goethe.

CINEF #4 2018 - Cinéma au féminin (Kinshasa) : Indélébile | Indelible by/de Paradis Mananga


Court Métrage – Short
Fiction
Indélébile (Indelible) (2018)
by/de Paradis Mananga (RDC)

SYNOPSIS

[English]
A tragic and indelible evening for three young people albeit with a promising future. Involuntarily, they murder the runaway teenager Sola, who is also deaf, mute, and mentally handicapped.

[Français]
Une soirée tragique et indélébile pour 3 jeunes gens cependant avec un avenir prometteur qui commettent involontairement un meurtre sur la personne de Sola, une adolescente handicapée et fugueuse, sourde, muette, et mentalement handicapée.


BIOGRAPHY | BIOGRAPHIE

[English]
Paradis Mananga est artiste musicienne, actrice et réalisatrice. Elle est aussi assistante à la production à Bimpa Production.

[Français]
Paradis Mananga is an artist musician, actress and filmmaker. She is also Production Assistant at Bimpa Production.





22 June 2018

Mis Me Binga 2018 – Paradis Mananga : Indélébile | Indelible (RDC)


Court Métrage – Short
Fiction
Paradis Mananga (RDC)
Indélébile (Indelible)

SYNOPSIS

[English]
A tragic and indelible evening for three young people albeit with a promising future. Involuntarily, they murder the runaway teenager Sola, who is also deaf, mute and mentally handicapped.

[Français]
Une soirée tragique et indélébile pour 3 jeunes gens cependant avec un avenir prometteur qui commettent involontairement un meurtre sur la personne de Sola, une adolescente handicapée et fugueuse, sourde, muette, et mentalement handicapée.


BIOGRAPHY | BIOGRAPHIE

[English]
Paradis Mananga est artiste musicienne, actrice et réalisatrice. Elle est aussi assistante à la production à Bimpa Production.

[Français]
Paradis Mananga is an artist musician, actress and filmmaker. She is also Production Assistant at Bimpa Production.

05 April 2018

Crowdfunding: ATA NDELE de/by Malkia Mutiri

Crowdfunding: ATA NDELE de/by Malkia Mutiri



Description:

The film « Ata Ndele" was born from the need to present, in a less stereotyped way, Belgian characters of foreign origin. To do this, Malkia and Nganji wrote a story of love, friendship and power struggle evolving at each stage of the characters’ lives. The main challenge was to take as a point of departure an idea that is often described as an Afro-European narrative to then being able to question a fundamentally human problem, namely: What remains of a collective ambition when it conflicts with the evolution of our private life?

Le film « Ata Ndele » est né de l’urgence de présenter de façon moins cliché que d’habitude des personnages belges d’origine étrangère.  Pour ce faire, Malkia et Nganji ont écrit une histoire d’amour, d’amitié et de rapport de force évoluant à chaque étape de la vie des personnages. Le principal défi était de prendre comme point de départ une idée que l’on qualifie par raccourci de récit afro-européen avant d’arriver à interroger une problématique foncièrement humaine, à savoir : que reste-t-il d’une ambition collective lorsqu’elle entre en conflit avec l’évolution de notre vie privée ?

Bio : Malkia Mutiri

Co-producer, co-writer, director, director of photography.
After studying at  l'Ecole Supérieure des Arts "75", Malkia does photo and video reports before making music videos, notably for singer Soul T and rapper Zwangere Guy. "Miel", Malkia's first short film receives a special mention at the KVS Film Festival System D in December 2016. "Ata Ndele" is her second short film.

Co-productrice, co-scénariste, réalisatrice, directrice photo.
Après ses études  à l'Ecole Supérieure des Arts le "75", Malkia signe des reportages photos et vidéos avant de réaliser quelques clips musicaux, notamment pour le chanteur Soul T et le rappeur Zwangere Guy. Miel, le premier court-métrage de Malkia reçoit une mention spéciale au Film Festival System D au KVS en décembre 2016.  "Ata Ndele" est son deuxième court-métrage. 

Pour rejoindre la compagne kisskissbankbank pour ATA NDELE et la soutenir:

To join the ATA NDELE kisskissbankbank campaign and to make a contribution: 

14 February 2015

FESPACO 2015 – Monique Mbeka Phoba: “Sœur Oyo” | “Sister Oyo”

Monique Mbeka Phoba: during the shooting | pendant le tournage
Fespaco 2015 – Short film in competition | court métrage en compétition

Sœur Oyo | “Sister Oyo” (2014)
Monique Mbeka Phoba (DCR-Belgium/Belgique)

The filmmaker | La réalisatrice

[English]
Monique Mbeka Phoba was born in 1962 in Brussels; daughter of a diplomat, she spent school holidays in the Congo. At the age of sixteen, after her father’s departure from his post she moved to Belgium. She studied at the Free University of Brussels where she was actively involved in the programmes of Radio Campus, producing many shows. After a degree in Commercial and International Sciences at the Institut d'Etudes Supérieures de Saint-Luc in Brussels, she enrolled in an introductory course in video documentary at Ateliers Varan, created by Jean Rouch, in Paris. In 1991 she directed Revue en vrac with Fred Mongu, journalist of the national television of Zaire. The film gives a perspective on the birth of the independent and pluralist press in the Congo. She continued with several documentaries all of which made a connection with Africa (she lived in Benin for several years and worked for the Benin TV) Rentrer? (1993); Deux petits tours et puis s'en vont (1997 - on the presidential elections in Benin); Un rêve d'indépendance (1998); Sorcière, la vie (2004); Entre la coupe et l’élection (2007).

[Français]
Monique Mbeka Phoba est née en 1962 à Bruxelles. Fille de diplomate, elle ne va au Congo qu'à l'occasion des vacances scolaires. Elle s'installe en Belgique à seize ans quand son père renonce à ses fonctions. Elle étudie à l'Université libre de Bruxelles où elle participe activement aux émissions de Radio Campus et elle réalise de nombreux reportages. Après une licence en sciences commerciales et internationales à l'Institut d'Etudes Supérieures de Saint-Luc à Bruxelles, elle fait un stage d'initiation à la vidéo documentaire aux Ateliers Varan à Paris, créés par Jean Rouch. En 1991, elle réalise avec Fred Mongu, journaliste de la Télévision nationale zaïroise, Revue en vrac (regard sur la naissance de la presse indépendante et pluraliste au Congo. Suivront plusieurs documentaires qui ont toujours un lien avec l'Afrique (elle a vécu au Bénin plusieurs années et a travaillé pour la télévision béninoise) : Rentrer ? (1993) ; Deux petits tours et puis s'en vont (1997 - sur les élections présidentielles au Bénin) ; Un rêve d'indépendance (1998) ; Sorcière, la vie (2004) ; Entre la coupe et l’élection (2007). (Africultures)

Synopsis

[English]
Set in the Belgian Congo in the 1950s, Sister Oyo tells the story of Godelive, a Congolese schoolgirl at the Catholic boarding school Mbanza-Mboma, the premiere French language school for Congolese girls. She is to be westernized, following the will of her parents, but the memory of her grandmother intervenes

[Français]
Dans le Congo colonial des années 50, une écolière congolaise, Godelive, vit dans le pensionnat catholique de Mbanza-Mboma, première école en français pour congolaises. Elle s'occidentalise, suivant le souhait de ses parents mais le souvenir de sa grand-mère s’interpose…

[English]
Monique Mbeka Phoba, scriptwriter, director and producer of the Sister Oyo talks about the film and her passionate experiences during the film production in an excerpt of an interview for the Africa Women in Cinema Blog

The title of the film, "Sister Oyo," which means in Lingala, in a slightly pejorative manner: "That sister there." So there is a kind of subtext, which would be: "This sister there, is she really what she appears to be?".

I probably got the idea for the film "Sister Oyo," the first time I realized that my mother could have been one of those little black girls seen in the famous film, The Nun’s Story (1959) by Fred Zinnemann, starring Audrey Hepburn. In fact, she lived for some time at a boarding school, in contact with Belgian nuns... And, furthermore Audrey Hepburn also played the role of a Belgian nun.

During the colonial period, the boarding school of the Sacred Heart of Mbanza-Mboma, in the province of Bas-Congo, created in 1947, had long been the only institution where Congolese schoolgirls could take their studies in French and not in a Congolese language. Unlike other African colonies under the British or French administration, where learning the language of the settlers was a sine qua non of education, the majority of Congolese children studied in their original language. Therefore, to receive instruction in French and learn to speak it fluently was considered a must. As the only institution of its kind, the boarding school of Mbanza-Mboma therefore received schoolgirls from across the country, and to be able to have their offspring admitted there was evidence of the social mobility coveted by the évolués. 

But who were these évolués? This category of Congolese made a lot of hullabaloo at the end of the Second World War, telling the Belgian colonial authorities who then ruled the country, that they would lose a lot for not treating them differently from the masses of other Congolese who were considered "uncivilized", to use the demeaning language that was current at the time...

In spite of this, my mother, a child and woman among the évolués, has hardly spoken to me about it. She attended the boarding school of Mbanza-Mboma a few years before her marriage and told me anecdotes, like the story of the snake that got into their dormitory... And so I said to myself as I was watching these “exotic” Hollywood films, without thinking much beyond that pleasure of enjoying a good story: "This is my mother, by the way, who is being filmed in this manner..." And hence this change of perspective was stunning for me!

I began to question these inter-perspectives: mine regarding this schoolgirl that was my mother, this colonial era during which she lived and which continues to be present within her and the Congo, these imposing white nuns, with their amazing headdress, the perspectives of the Belgian nuns toward their students, but also on the male and Congolese bodies which surrounded them.

God, the Devil, the Virgin Mary, angels, the colonial order and the hymns in the background, all in the heart of darkness of a rainforest...I thought there was something on the order of a Devil's cauldron in the process of boiling, reducing to smoke the pretense and false appearances. And that from there, all the essentials could then appear: these human beings, without the stamp of their label, who were they, who are they now? So if on one beautiful day God and the Devil came face to face in the forest, taking hostage the body of a nun who discovers she is also a woman, in this microcosm imbued in incommunicability and racial hierarchy, what would be called into question?

In short, seeking the unofficial history and corpses in the closet, weaving together the stories of forbidden couples with anecdotes of my mother, I formed a story that I adapted into a short film.

[Français]
Monique Mbeka Phoba, scénariste, réalisatrice et productrice du film « Sœur oyo » nous parle de ses expériences passionantes autour de la realisation (extrait d’entretien pour l’African Women in Cinema Blog)

Le titre du film est : « Sœur oyo », ce qui veut dire en lingala, de façon légèrement péjorative : « cette sœur-là ». Il y a donc une sorte de sous-texte, qui serait : « Cette sœur-là, est-elle bien celle qu’elle paraît être ? ». 

J'ai sans doute eu l’idée de ce film : « Sœur oyo », la première fois que je me suis rendue compte que ma mère aurait pu être une de ces « négrillonnes » vues dans le film "Au risque de se perdre" (1959), le fameux film de Fred Zinnemann, avec Audrey Hepburn. Elle a vécu en effet un certain temps dans un pensionnat, au contact des religieuses belges… Et Audrey Hepburn jouait d’ailleurs le rôle d’une religieuse belge.

A l’époque coloniale, le pensionnat du Sacré-Cœur de Mbanza-Mboma, dans la province du Bas-Congo, créé en 1947, a été longtemps la seule institution où des écolières congolaises pouvaient suivre leurs cours en français et non dans une langue congolaise. Contrairement aux autres colonies africaines, sous administration anglaise ou française, où l’apprentissage de la langue des colons était un sine qua non de la formation, la plupart du temps, les enfants congolais suivaient les cours dans leur langue originelle. De ce fait, bénéficier d’un enseignement en français et savoir le parler couramment était considéré comme un must. Etant la seule institution de ce type, le pensionnat de Mbanza-Mboma recevait donc des écolières de tout le pays et pouvoir y faire admettre sa progéniture était une des preuves d’ascension sociale dont raffolaient les évolués…

Mais, qui étaient les évolués ? Cette catégorie de congolais fit beaucoup de bruit, au sortir de la deuxième guerre mondiale, pour représenter aux autorités coloniales belges qui dirigeaient alors le pays, qu’elles perdaient beaucoup à ne pas les traiter différemment de la masse des autres congolais encore “non civilisés”, pour employer le langage dévalorisant qui avait cours à l’époque…

De tout cela, ma mère, fille et femme d’évolué, ne m’a guère parlé. Elle a fréquenté le pensionnat de Mbanza-Mboma, quelques années avant son mariage et m’en a raconté des anecdotes, comme l’histoire de ce serpent qui se serait introduit dans leur dortoir… Et, je me suis donc dit, alors que je regardais ces films hollywoodiens et exotiques jusque-là, sans penser guère plus loin qu’au plaisir de savourer une bonne histoire : « Mais, au fait, c'est ma mère qu'on filme ainsi… ». Et dès lors, le changement de perspective a été étourdissant !

J’ai commencé à m’interroger sur ces inter-regards : le mien sur cette écolière qu’était ma mère, sur cette époque coloniale qu’elle avait vécu et qui continue d’être présente en elle et au Congo, sur ces impressionnantes religieuses blanches, aux incroyables cornettes, le regard de ces religieuses belges sur leurs élèves, mais aussi sur les corps masculins et congolais, qui les environnaient…

Avec Dieu, le Diable, la Vierge Marie, les Anges, l’ordre colonial et les cantiques en arrière-plan sonore, tout cela au cœur des ténèbres d’une forêt équatoriale...Je me suis dit qu’il y avait quelque chose de l’ordre d’un chaudron du Diable, en train de bouillonner, réduisant en fumée tous les faux-semblants et les faux paraîtres … Et qu’à partir de là, pouvaient apparaître les fondamentaux : ces êtres humains, sans le poinçon de leur étiquetage, qui étaient-ils, qui sont-ils toujours ? Donc si le Bon Dieu et le Diable se font face un beau jour dans la forêt, prenant en otage le corps d’une religieuse qui découvre qu’elle est aussi une femme, quelle remise en cause peut-il se produire, dans ce microcosme qui macère dans l’incommunicabilité et la hiérarchisation raciale ?

Bref, en quête d’histoire non-officielle et de cadavres dans les placards, en tricotant ensemble ces histoires de couples interdits avec les anecdotes de ma mère, j’ai tiré une nouvelle, que j’ai donc adapté en un court-métrage…

Images: ©Soeur Oyo - Monique Mbeka Phoba

Link | Lien



09 February 2013

FESPACO 2013 - Claude Haffner : Noire ici, blanche là-bas | Footprints of My Other


Claude Haffner and her grandmother | et sa grand-mère
Fespaco 2013 - Documentary | Documentaire

Noire ici, blanche là-bas | Footprints of My Other (2012)
Claude Haffner (DRC)

VERSION FRANÇAISE CI-DESSOUS

[English]
...I discovered the poverty in which my mother's family lived, and I wanted to talk about this heartbreaking reality in a different manner than that presented by the media, that is to say without the tendency to dwell on the sordid side of life, which I hate. I looked for a way to educate and at the same time not bore the viewer, but also that he or she may be able to identify with the story, whether the person is black, white or any other colour of the rainbow. I knew that to bring it to the screen, I had to enter into the story. But I did not at all imagine that I would talk about myself, my history, my bi-raciality

...The film helped me to define my identity and my place between Europe and Africa and to become aware of the richness that I possess to have come from a double culture or perhaps I should say, multiple.

...We lived in Alsace, and as a child I was not at all aware of what my mother was living "in exile" in Strasbourg. We lived in a nice neighbourhood; there were children of all races and all religions in my school, I did not ask any questions on this existential "in between-ness". I thought it was cool to be of mixed race, because my parents kept telling me it was a great opportunity to bring colour in the bouquet of the world. And this has been true until the day I went to Kasaï. Suddenly I was a foreigner there, a stranger in my own family, a foreigner of the culture, of the history. I was pleased with this experience, but as I stated in the film, I was very uncomfortable. To really understand, one must experience things for oneself. And with maturity, one observes the world differently, asking new questions. In other words, the experiences of my parents would remain abstract as long as I had not been confronted with Africa.

...Very early my father made me aware of cinema, as he organised film screenings at home for my friends and I in Kinshasa, when I was barely two years old. And then filmmaking professionals were part of the family. Ousmane Sembene was godfather to my brother for example. But when I was preparing for my school diploma and my father asked me what I wanted to study, I told him I wanted to go to film school and he categorically refused because he wanted me to do some "serious" studies. So I opted to study history. But the idea of making films did not leave me, and parallel to my history degree, I enrolled in my fathers film classes. When I submitted my first paper to my father, I was nervous, as he was very strict with me. I had no room for error. He telephoned me after reading it and told me that my paper was excellent and that he was very proud, acknowledging that I had mastered film culture. After graduation, he agreed to let me go to Paris to continue audiovisual studies at university.

...In order to journey still a bit further in the miracle....His fellow artists wanted to create an original work for his tombstone, and I found this epitaph. Because my father was an optimist humanist, I felt that this sentence reflected his thoughts, his philosophy. And I think that he gave me this gene. In any case, this is the manner in which I wanted to construct and conclude the film: Yes it is hard, yes it is severe, yes there is poverty, yes there is suffering in the world and among people, but nothing is definitive and impossible. Life is a journey that continues into death, which is not an inevitability in my view, but rather a continuum: a miracle, in the extraordinary sense of the word. Yes life is an extraordinary journey.


[Français]
...Je découvrais la pauvreté dans laquelle vivait ma famille maternelle, et je voulais parler de cette triste réalité d'une manière différente que celle utilisée par les médias, c'est-à-dire sans aucun misérabilisme, car c'est une chose dont j'ai horreur. J'ai cherché comment sensibiliser le spectateur de manière à ce qu'il ne s'ennuie pas, mais aussi qu'il puisse s'identifier à l'histoire, qu'il soit noir, blanc ou de n'importe quelle autre couleur de l'arc-en-ciel. Je savais que pour porter cette histoire à l'écran, je devais me mettre en scène. Mais loin de moi était l'idée de parler de moi, de mon histoire, de mon métissage...D'une certaine manière, le film m'a aidée à définir mon identité et ma place entre l'Europe et l'Afrique et fait prendre conscience de la richesse que je possédais d'être issue d'une culture double, ou devrais-je plutôt dire multiple.

...Pour moi nous vivions en Alsace, et enfant je n'avais absolument pas conscience de ce que vivait ma mère « en exil » à Strasbourg. On vivait dans un chouette quartier, il y avait des enfants de toutes races et de toutes religions dans mon école, je ne me posais pas de question existentielle sur cette « entre-deux ». Je trouvais cool d'être métis, car mes parents me répétaient que c'était une grande chance d'apporter de la couleur dans le bouquet du monde. Et cela est vrai jusqu'au jour où je suis allée au Kasaï. Tout à coup j'étais moi étrangère là-bas, étrangère dans ma propre famille, étrangère de la culture, de l'histoire. J'étais heureuse de cette expérience, mais très mal-à-l'aise comme je le dis dans le film. Il faut vivre les choses soi-même pour les comprendre vraiment. Et puis l'âge aidant, on observe le monde différemment, on se pose de nouvelles questions. En d'autres termes, les expériences de mes parents étaient abstraites tant que je n'avais pas été confronté à l'Afrique.

...Mon père m'a effectivement sensibilisée très tôt au cinéma, puisqu'il organisait des projections de film à la maison pour mes petits camarades et moi-même à Kinshasa, alors que j'avais à peine deux ans. Et puis les gens du cinéma faisaient partie de la famille. Sembène Ousmane était le parrain de mon frère par exemple. Mais lorsque je préparais mon bac et que mon père m'a demandé ce que je voulais faire comme études je lui ai annoncé que je souhaitais faire une école de cinéma, et il me l'a formellement interdit, car il voulait que je fasse des études « sérieuses ». J'ai donc opté pour la faculté d'Histoire.

...« Pour voyager encore un peu plus loin dans le miracle » :  ...Ses amis artistes voulaient créer une œuvre originale pour sa pierre tombale, et j'avais trouvé cette épitaphe. Car mon père était un humaniste optimiste, et je trouvais que cette phrase traduisait bien sa pensée, sa philosophie. Et je crois qu'il m'a transmis ce gène. C'est en tout cas de cette manière que je voulais construire et conclure le film. Oui c'est dur, oui c'est grave, oui il y a de la misère, oui il y a de la souffrance dans le monde et entre les hommes, mais rien n'est définitif et impossible. La vie est un voyage qui se poursuit dans la mort, qui n'est pas une fatalité à mes yeux, mais bel et bien une continuité : un miracle, au sens extraordinaire. Oui, la vie est un voyage extraordinaire.



Noire ici, blanche là-bas




15 March 2012

African Diasporas. Claude Haffner: "Black Here, White There" | "Footprints of My Other "

Claude Haffner with her grandmother
An interview with Franco-Congolese filmmaker Claude Haffner by Beti Ellerson regarding her documentary film, Footprints of My Other (2012)
Claude, a moving autobiographical story about your place “in between”—black and white as a racial signifier, Africa and Europe—their contrasting beliefs and customs, class, status and gender—what you represent as an Alsatian and its contradictions as a Congolese. I also discern your need to redefine yourself in relationship to your father and mother—a liberation, as you call it, and finally as an expectant mother, your research on the formation of identity and how you will transmit your own multiple identity to your child with the hopes that she will be able to find, as you have between black and white, her own colour. Some reflections?

Initially, I wanted to make a film that focused solely on the diamond operations and the turmoil that I discovered the first time I went to the Congo. I saw the poverty in which my mother's family lived, and I wanted to talk about this heartbreaking reality in a different manner than that presented by the media, that is to say without the tendency to dwell on the sordid side of life, which I hate. I looked for a way to educate and at the same time not bore the viewer, but also that he or she may be able to identify with the story, whether the person is black, white or any other colour of the rainbow. I knew that to bring it to the screen, I had to enter into the story. But I did not at all imagine that I would talk about myself, my history, my bi-raciality.

Then I contacted the South African producer/director Ramadan Suleman to propose the project. Ramadan read the draft and immediately called me back to say that he liked the idea a lot and he was prepared to produce the film, however he thought that I had to be more involved in it since it was my family, my country, my feelings; that this aspect should be more pronounced. So I added my individual history to the story.

But what is wonderful about the documentary is that no matter how much one may write and rewrite the script, at the end it is the characters and the scenes that are shot that will decide the final product. The issue of culture, of being mixed-race, the place between father and mother, the transmission of identity to the child, none of these themes were written. They emerged during the filming. I had not planned to talk about skin colour with my cousins for example. It’s what is called the "magic of the documentary." At least that's the way I love films and how I would like to make them. Not knowing everything in advance about how the film will look, not forcing situations in order to relate the story, but rather leaving room for unanticipated situations. The film should redefine itself as the shooting unfolds in the same way that the filmmaker redefines herself in relation to her initial idea and to her subject. This is evident in the fact that in 2004 I could not foresee that I would be expecting a child after having filmed in the Congo, and that I would actually include myself, while pregnant, during the scenes in Alsace. Somehow, the film helped me to define my identity and my place between Europe and Africa and to become aware of the richness that I possess to have come from a double culture or perhaps I should say, multiple.

Through your narration and the family photo album we find that the story is also about your parents who also lived in between—Africa and Europe, your father Pierre Haffner, whose passion for African cinema takes him to the Congo to teach, and which continues upon his return to France. But more visibly of your mother, who is black living in a white world, African living in a European culture and more poignantly a Congolese woman escaping the poverty that her family must endure. How did their experience influence you?

One cannot tell everything in 52 minutes, and I unfortunately could not construct the theme that was dearest to my heart, which would relate a bit more in detail the story of my maternal family. Actually, my mother and her siblings were born, raised and educated in Katanga and not Kasaï, which is the land of our ancestors where my grandparents were born. However they left for Katanga to live as newlyweds. There, my grandfather was a chauffeur and earned enough money to offer a decent life and education to his children. But in the 1990s, Mobutu drove out the Kasaïans from Katanga, and told them to go back "home" (as the European Jews were sent to live in Israel after World War II). My mother’s brothers had never set foot in Kasaï, as there was no work for them. This is where my family’s situation began to deteriorate.

I wanted to clarify this point, because it is important to help understand that my mother had attended school and received a religious education by the Belgian nuns during the colonial period and immediately afterwards. And as many Africans of her generation who had completed high school or university, she had already been exposed to European culture even before she and my father met. So for a long time, I was not really aware of my family’s poverty. I of course realised that we were extremely privileged compared to them, but to be honest it did not prevent me from sleeping at night. As the saying goes: "out of sight, out of mind". For me we lived in Alsace, and as a child I was not at all aware of what my mother was living "in exile" in Strasbourg. We lived in a nice neighbourhood; there were children of all races and all religions in my school, I did not ask any questions on this existential "in between-ness". I thought it was cool to be of mixed race, because my parents kept telling me it was a great opportunity to bring colour in the bouquet of the world. And this has been true until the day I went to Kasaï. Suddenly I was a foreigner there, a stranger in my own family, a foreigner of the culture, of the history. I was pleased with this experience, but as I stated in the film, I was very uncomfortable. To really understand, one must experience things for oneself. And with maturity, one observes the world differently, asking new questions. In other words, the experiences of my parents would remain abstract as long as I had not been confronted with Africa.
Growing up with your father’s interest in African cinema, how did this experience shape you as filmmaker and also as film critic? I’m thinking of your research “Le documentaire africain, un remède éventuel aux maux dont souffre le cinéma africain?” and “D'une fleur double et de quatre mille d'autres.”

In fact, very early my father made me aware of cinema, as he organised film screenings at home for my friends and I in Kinshasa, when I was barely two years old. And then filmmaking professionals were part of the family. Ousmane Sembene was godfather to my brother for example. But when I was preparing for my school diploma and my father asked me what I wanted to study, I told him I wanted to go to film school and he categorically refused because he wanted me to do some "serious" studies. So I opted to study history. But the idea of making films did not leave me, and parallel to my history degree, I enrolled in my father’s film classes. When I submitted my first paper to my father, I was nervous, as he was very strict with me. I had no room for error. He telephoned me after reading it and told me that my paper was excellent and that he was very proud, acknowledging that I had mastered film culture. After graduation, he agreed to let me go to Paris to continue audiovisual studies at university.

At that time, I wanted to be continuity supervisor. I made dozens of short films while working in that capacity, and my father liked the idea because it was a job as a worker like other technicians. I think he was afraid that this difficult world of cinema would swallow me, and I am grateful to him because it gave me the strength to meet the challenge and go further. And as it were, the death of my father made me decide to make my first documentary. On the one hand, the first barrier between filmmaking and me had fallen, and on the other hand I had to honour his memory by remaining "serious". The documentary is a very serious form of expressing stories in images, and it operates as a continuation of my passion for history. As for my experience in film criticism, it allowed me to reflect on the field in order to define my own film language. But I'm not interested in film criticism, per se. Because it is so difficult to make a film, I do not like writing about a film that I do not like. Though one cannot only critique films that one likes. However I love teaching, and when I get the opportunity from time to time, at an association event, at a school or university, I take great pleasure in talking about films that I like.

You choose to focus most of the story, around 40 minutes, on your experiences in the Congo, as a return to your ancestral homeland. The first time accompanied by your mother, which you describe as having experienced the reality of Congo as you hid behind her, and the second time alone, having been “liberated”, you were now trying to “find your place.” Your mother talks about raising you and your brother totally acculturated into Alsatian culture, and you lament about not having learned Lingala. Why this physical alienation from Africa, in a household full of books, music, sculpture and paintings and with a father whose expertise is in African culture?

I feel like saying "this is a question to pose to my parents!" Indeed, I think one first learns what is taught at school. And I received a French education. One shares the culture of one’s young classmates. And I was surrounded by children from diverse backgrounds, but not particularly African. And it's not because your parents have a library full of Nietzsche, for example, that you know or you are interested in philosophy. It is not because there is a Picasso on the wall that you know everything about Cubism. And if your parents speak French at home and do not teach you another language, I know few, especially children, who would go through the process of learning it. It is true that this is something I deeply regret about my childhood and I blamed my parents for it, but it's never too late to learn, to reconnect to one’s native culture. This is the message of the film. Life should not stop with what has been acquired, it is a permanent learning experience; this is what is wonderful about it.

In the film you talk about reconciling with your mother having better understood where she comes from, beginning to respect her, becoming closer to her. Reconciliation implies there were issues that had to be resolved. What prevented reconciliation before now?

I felt secondary to my mother’s concerns about her family in the Congo. I thought she spent too much time dealing with them and not enough on us. I suffered from her "absence." With age, one finally understands the complexity of life, and if one follows the path of wisdom, one is able to forgive.

As a viewer I was very touched by your putting yourself in such a vulnerable position when talking with your cousins about how you suffered from feelings of not belonging—as your cousin stated, being “in between”. Nonetheless, I found your cousins equally vulnerable as they had to deal with your European and light skin privilege—an assignment that you adamantly rejected. Some reflections? Why the choice in filming this encounter?

Again it is the miracle of the documentary that was in operation. In my scenario, it was written that I would be filmed exchanging formalities with my cousins. But, upon arriving in the family courtyard, I turned to the cameraperson, Donne Rundle, who was preparing the equipment, and I said: "Frankly, I do not know at all what I will say to them, we never talk to each other, I am not at all comfortable." Donne responded to me: "Well that's exactly what you're going to tell them!" And I am very grateful to her, because for this sequence and others, her support was invaluable. During the editing everyone was touched by that moment, it was imperative that this scene turn out well! We spent days on it, editing and reediting, because it became pivotal to the film. It, in fact, determined the film's title, which was originally to be called “Kasaï”.

I discerned a bit of a feminist moment when you asked why as a woman, you could not participate in the ancestral mourning ceremony. On the other hand, you exerted power in the context of class and wealth, distributing money to your relatives—men and women, all very appreciative of your gift. Some reflections on these contrasting roles?

Feminist, I do not know! But it is clear that I did not expect this, since in many communities that I visited the women were the ones who spoke to the dead and who wept. And here I am with someone I do not know, who I had only met for the first time, and who will do the ceremony in my place. That's why at the end of the film, it was important for me to do my own "ceremony" in Alsace. To say, "yes, I respect the tradition of the Baluba in their land, but elsewhere I do it my way." However, if there is feminism in the film, it is in honouring my grandmother, my aunt, my cousins and all the women of Africa and elsewhere who fight to "keep the pots turning" as the governor of Kasaï said. That's why I wanted to end with the idea that there are solutions for our country and our people to lift themselves out of poverty, starting with the focus on girls’ education.

In constructing your story there were of course some things that you left out for various reasons. What cinematic choices did you make to tell this story?

Oh yes, there are many themes that I wanted to cover and that I had to give up along the way, because I could not deal with everything in 52 minutes, which is the format of the TV documentary. I especially wanted to present more information on the historical background of the Congo from the 70s until today. I also wanted to talk about the history of my ethnic group the Baluba, who has suffered from the "pogroms" and is known for being rebellious and combative. And above all I wanted to denounce the exploitation of diamonds and looting in my region. But all of these deserve the space of at least a two-hour film or a series. You have to play the game and make choices, even if they are extremely hard to do.

The film ends with a quote by your father: “In order to journey still a bit further in the miracle.” In what context did he say this and what does it mean to you and for this story you have told?

I found this phrase in one of his books, and strangely, I do not remember which one (I looked for it before editing the film, but I still have not found it). His fellow artists wanted to create an original work for his tombstone, and I found this epitaph. Because my father was an optimist humanist, I felt that this sentence reflected his thoughts, his philosophy. And I think that he gave me this gene. In any case, this is the manner in which I wanted to construct and conclude the film: Yes it is hard, yes it is severe, yes there is poverty, yes there is suffering in the world and among people, but nothing is definitive and impossible. Life is a journey that continues into death, which is not an inevitability in my view, but rather a continuum: a miracle, in the extraordinary sense of the word. Yes life is an extraordinary journey.
Interview with Claude Haffner and translation from French by Beti Ellerson, March 2012.


Claude Haffner : « Noire ici, blanche là-bas »

Claude Haffner avec sa grand-mère
Entretien avec la cinéaste franco-congolaise Claude Haffner par Beti Ellerson à propos son film, Noire ici, blanche là-bas (2012)

Claude, une émouvante histoire autobiographique sur ta place « entre deux », noire et blanche comme signifiant racial, entre Afrique et Europe, leurs croyances et coutumes différentes, entre classe, statut social et genre—ce que tu représentes en tant qu’Alsacienne et leurs contradictions en tant que Congolaise. Je discerne aussi ton désir de te redéfinir par rapport à ton père et ta mère, une émancipation comme tu le dis. Et puis, comme une future mère ta recherche sur la formation d’identité et comment tu transmettras ta propre identité multiple à ton enfant avec l’espoir qu’elle trouvera, comme tu l’aurais pu entre le blanc et le noir, sa propre couleur. Quelques réflexions ?

Au départ, je voulais faire un film qui portait uniquement sur l'exploitation des diamants et le chaos que j'avais découverts en allant la première fois au Congo. Je découvrais la pauvreté dans laquelle vivait ma famille maternelle, et je voulais parler de cette triste réalité d'une manière différente que celle utilisée par les médias, c'est-à-dire sans aucun misérabilisme, car c'est une chose dont j'ai horreur. J'ai cherché comment sensibiliser le spectateur de manière à ce qu'il ne s'ennuie pas, mais aussi qu'il puisse s'identifier à l'histoire, qu'il soit noir, blanc ou de n'importe quelle autre couleur de l'arc-en-ciel. Je savais que pour porter cette histoire à l'écran, je devais me mettre en scène. Mais loin de moi était l'idée de parler de moi, de mon histoire, de mon métissage.

Puis j'ai contacté le réalisateur producteur sud-africain Ramadan Suleman pour lui proposer le projet. Ramadan a lu le projet et m'a rappelée aussitôt en me disant qu'il aimait beaucoup l'idée et qu'il était partant pour produire le film, mais qu'il pensait que je devais me mouiller plus, car c'était ma famille, mon pays, mon ressenti. Que cela devait être plus marqué. J'ai donc rajouté à l'histoire une présentation de mon personnage.

Mais en documentaire, ce qui est merveilleux, c'est qu'on a beau écrire et réécrire le scripte, à l'arrivée ce sont les personnages et les scènes tournés qui décident de la finalité du film. La question de métissage, la place entre le père et la mère, la transmission d'une identité à l'enfant sont des thèmes qui n'étaient pas écrit. Ils sont apparus pendant le tournage. Je n'avais pas prémédité qu'on parle de couleur de peau avec mes cousins par exemple.

C'est ce qu'on appelle la « magie du documentaire ». Du moins c'est de cette manière que j'aime les films et que je souhaite réaliser. Ne pas tout savoir à l'avance à quoi va ressembler le film, ne pas forcer les situations pour raconter ce qu'on a décidé de raconter, mais au contraire laisser le champ à la réalité d'offrir des surprises au réalisateur. Que le film se redéfinisse au fur et à mesure du tournage, de la même manière que le réalisateur se redéfinit lui-même par rapport à son idée de départ et à son sujet. La preuve en est que je ne pouvais pas prévoir en 2004 que j'attendrai un enfant après avoir tourné au Congo, et que je me mettrai en scène enceinte en Alsace. D'une certaine manière, le film m'a aidée à définir mon identité et ma place entre l'Europe et l'Afrique et fait prendre conscience de la richesse que je possédais d'être issue d'une culture double, ou devrais-je plutôt dire multiple.

À travers ta narration et album de famille, on découvre que l'histoire est aussi celle de tes parents qui, eux aussi, vivaient « entre deux » l’Afrique et l’Europe, pour ton père Pierre Haffner, pour qui la passion pour le cinéma africain l'amenait au Congo pour l'enseigner, ce qu’il continuera à son retour en France. Mais plus visiblement pour ta mère, une noire qui vivait dans un monde blanc, une Africaine vivant dans une culture européenne et d’autant plus, une Congolaise qui s'est échappée de la pauvreté que sa famille continue à subir. Comment as-tu été influencée par leurs expériences ?

On ne peut pas tout raconter en 52 minutes, et je n'ai malheureusement pas pu monter un thème qui me tenait à cœur, qui raconte un peu plus dans les détails l'histoire de ma famille maternelle. En réalité, ma mère et sa fratrie sont nés, ont grandi et étudié au Katanga et non au Kasaï. Le Kasaï est la terre de nos ancêtres qui a vu naître mes grands-parents, mais ils sont partis vivre au Katanga lorsqu'ils étaient fraîchement mariés. Là-bas, mon grand-père était chauffeur et il gagnait suffisamment d'argent pour offrir une vie et une éducation descente à ses enfants. Mais dans les années 90, Mobutu a chassé les personnes d'origine kasaïenne du Katanga, et leur a demandé de rentrer « chez eux », comme on avait demandé aux Juifs d'Europe de partir vivre en Israël après la deuxième guerre mondiale. Les frères de ma mère n'avaient jamais posé un pied au Kasaï, où il n'y avait pas de travail pour eux. C'est là que la situation de ma famille s'est dégradée.

Je tenais à préciser ce point, car il est important pour aider à comprendre que ma mère ait eu une scolarité et une éducation religieuse offerte par les sœurs belges pendant la colonisation et juste après, et que comme beaucoup d'Africains de sa génération, qui ont fait des études secondaires, voire universitaires, elle était confrontée à la culture européenne avant même d'avoir rencontré mon père. Pendant longtemps, je n'étais donc pas véritablement sensibilisée à la pauvreté de ma famille. J'avais bien sûr conscience que nous étions extrêmement privilégiés comparé à eux, mais pour être honnête cela ne m'empêchait pas de dormir la nuit. Comme dit l'adage : « loin des yeux, loin du coeur ». Pour moi nous vivions en Alsace, et enfant je n'avais absolument pas conscience de ce que vivait ma mère « en exil » à Strasbourg. On vivait dans un chouette quartier, il y avait des enfants de toutes races et de toutes religions dans mon école, je ne me posais pas de question existentielle sur cette « entre-deux ». Je trouvais cool d'être métis, car mes parents me répétaient que c'était une grande chance d'apporter de la couleur dans le bouquet du monde. Et cela est vrai jusqu'au jour où je suis allée au Kasaï. Tout à coup j'étais moi étrangère là-bas, étrangère dans ma propre famille, étrangère de la culture, de l'histoire. J'étais heureuse de cette expérience, mais très mal-à-l'aise comme je le dis dans le film. Il faut vivre les choses soi-même pour les comprendre vraiment. Et puis l'âge aidant, on observe le monde différemment, on se pose de nouvelles questions. En d'autres termes, les expériences de mes parents étaient abstraites tant que je n'avais pas été confronté à l'Afrique.

Grandissant avec un père spécialiste dans le cinéma africain, cette expérience était-elle un facteur lorsqu'il s'agit de décider d'être cinéaste et aussi critique de cinéma—Je pense à ta recherche: « Le documentaire africain, un remède éventuel aux maux dont souffre le cinéma africain? » et ton film D'une fleur double et de quatre mille d'autres.

Mon père m'a effectivement sensibilisée très tôt au cinéma, puisqu'il organisait des projections de film à la maison pour mes petits camarades et moi-même à Kinshasa, alors que j'avais à peine deux ans. Et puis les gens du cinéma faisaient partie de la famille. Sembène Ousmane était le parrain de mon frère par exemple. Mais lorsque je préparais mon bac et que mon père m'a demandé ce que je voulais faire comme études – je lui ai annoncé que je souhaitais faire une école de cinéma, et il me l'a formellement interdit, car il voulait que je fasse des études « sérieuses ». J'ai donc opté pour la faculté d'Histoire.

Mais l'idée de faire du cinéma ne me lâchait pas, et parallèlement à ma licence d'histoire je suivais les cours de cinéma de mon père. Lorsque j'ai remis ma première copie à mon père, j'étais très anxieuse. Mon père était exigeant avec moi, je n'avais pas le droit à l'erreur. Il m'a téléphoné après l'avoir lue, et m'a dit qu'il était très fière, car ma copie était excellente, et qu'il devait bien avouer que je maîtrisais la culture cinématographique. Après ce diplôme, il a accepté de me laisser partir à Paris pour continuer des études universitaires d'audiovisuelles. À cette époque, je voulais être script-girl. J'ai fait des dizaines de court métrages en tant que script-girl, et mon père aimait cette idée, car la script-girl est comme les autres techniciens, un ouvrier et non un maître de chantier. Je pense qu'il avait peur que ce monde difficile du cinéma ne m'avale, et je lui en suis reconnaissante, car cela m'a donné la force de le défier et d'aller plus loin.

Ainsi, c'est le décès de mon père qui m'a décidé à réaliser mon premier documentaire. D'un côté la première barrière entre la réalisation et moi tombait, de l'autre je devais honorer sa mémoire en restant « sérieuse ». Le documentaire est une forme très sérieuse d'exprimer des histoires en image, et il intervient comme une continuité de ma passion pour l'Histoire. Quant à mon expérience dans la critique, elle m'a permise de réfléchir sur le genre afin de définir ma propre écriture cinématographique. Mais cela ne m'intéresse de critiquer les films. Il est si dur de réaliser un film, que je n'aime pas écrire sur un film que je n'aime pas. Or on ne peut pas être critique de films qu'on aime exclusivement. En revanche j'adore enseigner, et quand j'en ai l'occasion de temps à autres, dans une association, une école ou une université, je prends beaucoup de plaisir à parler des films que j'aime.

Pour la plupart du film, environ 40 minutes, on te suit au Congo, le retour à la terre natale, la première fois avec ta mère, mais tu as senti qu’en te cachant derrière elle que tu as pu expérimenté la réalité du Congo. La deuxième fois, « tu t'es émancipée » et tu es partie seule pour « trouver ta place ». Ta mère parle de l'incorporation quasiment totale dans la culture alsacienne dans laquelle toi et ton frère avez été élevés et toi, tu te lamentes de ne pas apprendre le Lingala. Pourquoi cette aliénation de l'Afrique dans une maison pleine de livres, musique, sculptures, peintures africains et avec un père qui s'est spécialisé dans la culture africaine ?

J'ai envie de répondre : « c'est une question qu'il faut poser à mes parents ! » En effet je pense que l'on apprend d'abord ce que l'école offre comme enseignement. Et j'ai reçu un enseignement français. On partage la culture de ses petits camarades de classe. Et j'étais entourée d'enfants d'origines diverses, mais pas particulièrement africaine. Et ce n'est pas parce que vos parents ont une bibliothèque remplie de Nietzsche par exemple, que vous connaissez ou vous vous intéressez à la philosophie. Ce n'est pas parce qu'il y a du Picasso au mur que vous connaissez tout du cubisme. Et si vos parents parlent en français à la maison et ne vous enseigne pas d'autre langue, je connais peu voir pas d'enfant qui ferait la démarche d'apprendre. Il est vrai que c'est quelque chose que je regrette profondément concernant mon enfance et que j'ai reproché à mes parents, mais il n'est jamais trop tard pour se rapprocher de sa culture d'origine, pour apprendre. C'est le message du film. La vie ne doit pas s'arrêter sur l'acquis, c'est un apprentissage permanent, en cela elle est merveilleuse.

Dans le film, tu dis que tu t'es réconciliée avec ta mère après avoir mieux compris ses expériences, que tu as commencé à la respecter et t'approcher d'elle. Une réconciliation suggère qu'il y a les choses à résoudre. Pourquoi cette réconciliation n’a pas eu lieu auparavant ?

Je me sentais mise à l'écart par les préoccupations de ma mère concernant sa famille au Congo, je trouvais qu'elle s'occupait trop d'eux et pas assez de nous, je souffrais de son « absence ». Avec l'âge, on finit par comprendre la complexité de la vie, et si l'on suit la voie de la sagesse, on arrive à pardonner.

Comme spectatrice j'ai été très touchée par ton choix de te positionner dans la vulnérabilité avec tes cousins. Tu parlais de ta souffrance en n'étant pas à ta place, donc noire en France, blanche au Congo, comme ta cousine a dit, « entre deux ». Pourtant, j'ai trouvé que tes cousins étaient dans une position également vulnérable face à ta position socioculturelle privilégiée en tant qu'européenne et une personne claire de peau, que tu veuilles ou non. Quelques réflexions ? Pourquoi ce choix de filmer cette rencontre ainsi?
Là encore c'est le miracle du documentaire qui a opéré. Dans mon scénario, il était écrit qu'on me filmerait avec mes cousins, full stop. Arrivée dans la cour familiale, je me suis tournée vers la cameraman, Donne Rundle, qui préparait le matériel, et je lui ai dit : « franchement, je ne sais pas du tout ce que je vais leur dire, on ne se parle jamais, je ne suis pas à l'aise » - et Donne m'a répondu : « et bien c'est exactement ce que tu vas leur dire ! ». Et je lui suis très reconnaissante pour cela, car pour cette scène et pour d'autres, elle a été d'un soutien précieux. Puis au montage, tout le monde a été touché par ce moment, il ne fallait pas rater la scène. On a passé des jours dessus, à monter et remonter, car cette scène devenait charnière pour le film. C'est cette scène aussi qui a déterminé le titre du film, qui était à l'origine Kasaï. 

J’ai discerné un petit moment féministe quand tu as demandé pourquoi en tant que femme tu n’as pas pu participer à la cérémonie de deuil. Par contre, tu as exercé un pouvoir dans le contexte de classe et ressources financières en distribuant l’argent à tes proches—hommes et femmes—tous très reconnaissants de ce don très généreux. Quelques réflexions sur ses rôles contrastés…
Féministe, je ne sais pas, mais il est clair que je ne m'y attendais pas dans la mesure où dans beaucoup de communauté que j'ai fréquentée ce sont les femmes qui s'adressent aux morts et les pleurent. Et là, je me retrouve face à une personne que je ne connais pas, que je vois pour la première fois, et qui va faire la cérémonie à ma place. C'est pourquoi il était important pour moi de faire ma propre « cérémonie » en Alsace, à la fin du film. Pour dire « ok je respecte la tradition des balubas sur leur terre, mais ailleurs je le fais à ma manière ». Par contre s'il y a féminisme dans le film, c'est en mettant à l'honneur ma grand-mère, ma tante, mes cousines et toutes ces femmes d'Afrique et d'ailleurs qui se battent pour « faire tourner les marmites », comme le dit le gouverneur du Kasaï. C'est pourquoi je tenais à finir sur cette idée qu'il existe des solutions pour que nos pays et nos peuples se sortent de la misère par eux-mêmes, en commençant par miser sur l'éducation des filles.

En construisant ton histoire il y avait forcément des choses qui n’étaient pas incluses pour des raisons diverses. Quels étaient tes choix cinématographiques pour raconter cette histoire ? Y a-t-il eu les moments que tu as décidés de ne pas inclure ?

Oh oui, il y a beaucoup de thèmes que je voulais aborder et que j'ai du abandonner en route, car je ne pouvais pas tout traiter en 52 minutes, qui est le format télé du documentaire. Je voulais surtout donner plus d'informations sur le contexte historique du Congo des années 70 à nos jours, parler de l'histoire de mon ethnie baluba qui a subi des « pogroms » et qui est connue comme contestataire et combative. Et puis surtout je voulais dénoncer l'exploitation du diamant et le pillage de ma région. Mais tout cela mériterait un film de 2h ou une série, il faut savoir jouer le jeu et faire des choix, même s'ils sont extrêmement durs à prendre.

Le film termine avec une citation de ton père : « Pour voyager encore un peu plus loin dans le miracle ». Dans quel contexte l’a-t-il dit et qu’est-ce qu’elle signifie pour toi et pour l’histoire que tu as raconté.

J'ai trouvé cette phrase dans un de ses livres, et je ne me souviens étrangement plus dans lequel (j'ai recherché avant le montage du film, mais je n'ai toujours pas retrouvé). Ses amis artistes voulaient créer une œuvre originale pour sa pierre tombale, et j'avais trouvé cette épitaphe. Car mon père était un humaniste optimiste, et je trouvais que cette phrase traduisait bien sa pensée, sa philosophie. Et je crois qu'il m'a transmis ce gène. C'est en tout cas de cette manière que je voulais construire et conclure le film. Oui c'est dur, oui c'est grave, oui il y a de la misère, oui il y a de la souffrance dans le monde et entre les hommes, mais rien n'est définitif et impossible. La vie est un voyage qui se poursuit dans la mort, qui n'est pas une fatalité à mes yeux, mais bel et bien une continuité : un miracle, au sens extraordinaire. Oui, la vie est un voyage extraordinaire.

Entretien avec Claude Haffner par Beti Ellerson, mars 2012

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